Une moto à 11 millions de dollars qui ne cherche pas à plaire
Vous pouvez l’appeler moto, vous pouvez aussi l’appeler sculpture, provocation ou fantasme d’ingénieur. Ce que vous ne pouvez pas faire, c’est l’ignorer.
La Neiman Marcus Limited Edition Fighter n’est pas un exercice de style. C’est un manifeste. 45 exemplaires. Tous vendus. L’un d’eux a atteint 11 millions de dollars aux enchères, ce qui fait beaucoup pour une moto sans ABS, sans électronique d’assistance, et sans compromis.
Il n’est pas question ici de rationalité.
Une ligne venue d’un autre monde
Aucune carénage. Aucune concession. Aucun point d’accroche pour sacoches. Juste une armature nue qui semble arrachée à un croiseur intergalactique.
Son cadre ? Usiné dans une seule masse d’aluminium aéronautique. Un seul bloc. Pas de soudure visible. Pas d’artifice. Il épouse le moteur comme une armure liquide, et expose ses entrailles avec une honnêteté clinique. C’est brutal, chirurgical, presque froid. Et pourtant, c’est probablement l’une des lignes les plus organiques jamais dessinées dans l’univers de la moto.
Le train avant ? Un pivot central baptisé Inboard Hub, plus proche d’un prototype de MotoGP que de quoi que ce soit que vous avez croisé sur route. Et ce bras oscillant unilatéral ? Une pièce d’orfèvrerie. Tout est surdimensionné, et rien n’est superflu.
Des matériaux à faire pâlir un avion de chasse
Aluminium, titane, fibre de carbone. Voilà l’essentiel de la fiche technique.
Chaque vis, chaque entretoise, chaque courbe a été pensée pour résister au poids du regard autant qu’à celui de la vitesse. Les jantes sont en carbone. Les platines, en aluminium taillé masse. Les commandes reculent toute idée de confort au profit de la précision. Ce n’est pas une moto que vous domptez. C’est une bête qui tolère votre présence tant que vous êtes à la hauteur.
Elle pèse 206 kg. Un chiffre presque banal. Ce qui ne l’est pas, c’est la façon dont ce poids est réparti. Tout est centré. Compacté. Sculpté pour que chaque mouvement du pilote s’intègre dans une dynamique maîtrisée.
Un moteur qui grogne comme un V8 de dragster
Le cœur de la bête, c’est un V-Twin de 1966 cm³, gavé de couple, capable de sortir jusqu’à 220 chevaux, selon les versions. Oui, deux-cent-vingt. Pour une moto sans carénage, sans aide électronique, sans volonté de modération.
L’accélération ? 0 à 100 km/h en environ 3 secondes. La vitesse de pointe ? 305 km/h. Ce sont des chiffres qui n’ont aucun sens dans le monde réel. Mais la Fighter ne s’adresse pas au monde réel.
Elle s’adresse à celui qui a tout conduit, tout vu, tout possédé, et qui cherche encore un frisson nouveau. Elle est ce frisson.
Une position de conduite à la limite de la folie
Installez-vous à son bord. Vous êtes bas, très bas. Les pieds sont en arrière, les poignets tendus. La posture est celle d’un sprinter prêt à bondir, pas d’un touriste contemplatif.
Le confort ? Inexistant. Les suspensions ? Réglées pour l’attaque. Les freins ? Monoblocs, surpuissants, sans assistance. Si vous ratez votre freinage, ce ne sera pas la faute de la machine.
Le message est clair : si vous n’êtes pas à la hauteur, ne montez pas.
Ce n’est pas un véhicule, c’est un manifeste
La Fighter n’a pas été conçue pour faire du chiffre. Elle a été pensée comme une œuvre de guerre. Seulement 45 exemplaires ont été produits. Pas un de plus. Et chacun d’eux est aujourd’hui une pièce de collection, conservée dans des garages climatisés ou des musées privés.
L’un d’eux a été vendu 11 millions de dollars. C’est une multiplication par 100 par rapport à son prix de lancement initial. Dans un marché où les motos perdent parfois 30 % de leur valeur en sortant du showroom, ce type de valorisation relève du délire pur.
Mais voilà, ce n’est pas une moto. C’est une déclaration. Une preuve que le luxe, le vrai, n’est pas affaire de cuir matelassé ou de gadgets connectés. Il est affaire d’idée. Et ici, l’idée, c’est que l’extraordinaire n’a pas de limite.
Une moto pour ceux qui n’ont plus rien à prouver
Vous ne l’achèterez pas pour rouler tous les dimanches. Vous ne l’achèterez pas pour partir en vacances. Vous ne l’achèterez pas pour impressionner les copains. Vous l’achèterez parce qu’elle existe. Parce que dans un monde saturé de compromis, elle dit non. Et parce que vous pouvez.
La Neiman Marcus Fighter n’est pas une proposition. C’est un défi. Et à 11 millions de dollars, c’est le défi le plus cher que la moto ait jamais lancé.
Crédit photo : L’image à la une est une illustration artistique de la Neiman Marcus Fighter